Le pavillon représentant trois têtes de loup au milieu d'une forêt battait vivement, au ryhtme du vent et des vagues. L'air frais du grand large lui fouettait le visage. Seul, debout à la proue du bateau, il faisait face au vent cinglant qu'il sentait le lacérer, en témoigne sa peau rougie par le froid. Comme à son habitude, Helrhunarr Skogenulv, Chef du clan Skogenulv, profitait toujours d'un retour de voyage pour faire le point, aimant se retrouver seul face au vide, avant de retrouver le confort spartiate mais douillet de sa hutte, au près de sa femme et son fils.Cette histoire conte l'épopée d'un Galdur. Elle n'est pas achevée, puisque n'ayant pas encore fini de vivre ses aventures. Cependant, son destin hors du commun me force à vous expliquer comment il en est arrivé là où il est aujourd'hui. Bien sûr, le tout serait bien trop long. Attachons nous donc aux événements ayant attrait à son arrivée en Draïa
Son fils... C'est pour lui qu'il revenait. Il était revenu plus tôt que prévu de sa campagne de guerre contre des îles voisines, qui détenaient un Savoir qu'il convoitait. Un livre. Le Livre. On racontait qu'il suffisait de L'ouvrir et de demander à voix haute ce que l'on voulait savoir pour que la réponse apparaisse comme par enchantement. Passé, Présent, Futur. Le Livre savait tout.
Le problème, finalement, est qu'il n'avait pas prévu à quel point les autochtones défendait chèrement Le Livre. Il avait mené tout son clan, les Skogenulv, composé d'une vingtaine d'hommes les plus forts qui soient, afin d'avoir toutes les chances de récupérer le Savoir, mais que nenni. L'armée surnaturelle qui défendait Le Livre savait tout faire, et du mieux possible. Magie, Nécromancie, Combat rapproché ou à distance, même les machines de siège qu'ils avaient amenées par bateau n'y faisaient rien. Impossible pour Helrhunarr de ne capturer rien qu'un de ses opposants pour finalement comprendre comment ils s'organisaient. De son côté, il avait déjà perdu quatre hommes, dont son plus proche lieutenant.
Cette chasse au trésor n'aurait dû être qu'une formalité, mais voilà, le temps a passé et son fils est en âge de passer l'Epreuve d'entrée dans l'âge adulte.
"- Chef, nous apercevons la rive. Pépares-toi à débarquer.
- Oui... Praw. Je descend."
Un de ses hommes venait de le faire sortir de ses pensées. Il descendit dans sa cabine pour s'habiller plus chaudement, le vent froid lui ayant donné des angelures.
Sur la plage du village, autour d'un gigantesque feu de bois, femmes et enfants attendaient leurs maris, pères, frères, amis dans leurs plus beaux habits.
Débarqué en dernier, Helrhunarr fit signe à son fils et à sa femme d'attendre dans leur hutte. Car les retrouvailles ne seraient pas chaleureuses pour tout le monde...
"- Il... Où... Où est mon Grimnatt?", demanda une femme à la carrure imposante, blonde comme le blé, les sourcils froncés, à l'attention d'Helrhunarr. Celui-ci hocha la tête en pinçant ses lèvres.
"- Il ne reviendra pas. Personne n'a pu le sauver, nous avons essayé. Il a été envoyé vers son Dernier Voyage selon nos rites, et saches qu'il est parti avec honneur. Ses derniers mots ont été pour toi. Voici sa massue.", marquant une pause pour laisser à la veuve le temps d'encaisser le choc, il posa son énorme main sur son épaule, puis continua en serrant les dents : "Je te ramènerai la tête de celui qui l'a eu. Par les Dieux, j'en fais le serment." Il se détourna ensuite de la ferveur du reste de la foule, pour rejoindre les siens.
Le femme d'Helrhunarr était muette, si bien qu'il ne savait même pas son prénom. Il l'appelait Chérie. Traumatisée, enfant, lors de guerres intestines entre clans Galdurs, elle avait vécu des choses terribles, ce qui l'avait rendue incapable de s'exprimer. Ce qui n'empêchait en aucun cas qu'elle et Helrhunarr se comprennent. De plus, elle était relativement petite pour une Galdure. Son mari la dépassait d'une bonne tête et demie. Elle arborait un gigantesque tatouage composé d'arbres, dont les racines partaient du talon de son pied droit, avec les troncs qui remontaient dans le dos en soulignant harmonieusement ses fesses, pour finir en feuillages de toutes couleurs évoquant les saisons, dans le haut du dos, jusqu'à sa nuque et ses épaules. Des loups hurlant à la Lune se perdait au milieu de son dos. Ce tatouage signifiait son appartenance aux Skogenulv, qui l'avaient recueillie, enfant. Sa chevelure impeccablement tressée était d'un blond extrêmement foncé, presque ambré. Elle accueulli son mari d'un grand sourire et d'une carresse sur la joue.
Son fils, Vadrykh, quant à lui, était l'inverse de sa mère. Vif, extrêmement grand pour son jeune âge, bien bâti et avec une langue des plus pendues, il entrait dans l'âge adulte. Son père l'avait tatoué - des runes sur le crâne, comme papa - et il en était très fier. Lui avait les cheveux blonds de sa mère, les yeux marrons clair pétillants de son père, la barbe naissante et de grandes boucles d'oreille pinçaient ses lobes. Il accouru vers son père et le salua.
"- Ch'waark! Alors, Père, alors? Vous l'avez ce coup-ci? Et tu restes cette fois? Et est-ce que tu vas m'apprendre à tirer à l'arc?
- Pas maintenant, Vadrykh. Equipes-toi, je veux que tu sortes t'entrainer. Je dois parler à ta mère.
- Mais je...
- Ne discutes, pas. C'est très sérieux. Reviens dans une heure.
- Bien. A tes ordres. Mais est-ce...
- Maintenant!!", hurla-t-il, les yeux exorbités, ce qui fit déguerpir Vadrykh.
Helrhunarr devait maintenant expliquer à sa femme qu'il emmènerait leur fils, la prochaine fois qu'ils retourneraient chercher Le Livre. Il le devait. C'était le rite d'entrée dans l'âge adulte qu'il avait choisi pour son fils. Chérie blêmit encore plus, si cela était possible, écoutant son mari exposer son plan.
La rassurant finalement, promettant que tout se passerait bien, Helrhunarr la déshabilla et lui fit l'amour tendrement, en profitant de son imposant tatouage. Sans même se douter que ce serait la dernière fois.