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Dans l'ombre de la Lune...[achevé]

Publié : 10 juil. 2007, 11:06
par Kharya
C’était il y a de nombreux fingeliens, dans une caverne sombre des froides montagnes du vieux continent en frontière des terres elfiques, que je naquis au sein du clan Norhen Dagha, elfe noire nommé Kharay. Je suis fille de Nalym, prêtresse de Lith, et de Ashonn, assassin de la guilde de notre clan, choisi comme reproducteur sur des critères de mérites suivant nos traditions.

Mon nom avait été choisi par la Mère-Matronne selon la volonté de Lith et signifiait dans un dialecte ancien de notre clan Rayon de Lune. Je n’aimais pas ce nom. Trop lumineux à mon goût.

J’étais comme toute femelle du clan destinée à servir dans le Temple de Lith. Mais plus les années se succédaient plus je me rendais compte que cette fonction ne me convenait pas. Après de nombreuses punitions pour avoir désobéit aux traditions et à la Mère-Matronne j’avais décidé de quitter nos cavernes et de partir là où je pourrais vivre sans leurs reproches incessants et y vivre ma passion pour les armes et les armures.

J’embarquai alors pour l’île du Trepont avec détermination. Je n’étais plus Kharay mais Kharya, ce changement me plaçant ainsi dans l’ombre de la Lune…

Publié : 10 juil. 2007, 14:47
par Kharya
Depuis mon arrivée en ces terres hostiles je m’attache à devenir forgeronne…Je me suis acharnée à récolter encore et encore les éléments nécessaires à mon art…Ces temps longs faits d’allers-retours ennuyeux m’ont permis de réfléchir à ce qui m’a mené vers cette volonté de créer ce qui détruit.

Je pense pouvoir commencer par ce premier évènement qui aujourd’hui me semble bien éloigné…

En tant que femelle du clan, je reçu l’enseignement religieux dès que je fus en âge de marcher. Mais malgré cela, en grandissant, je me désintéressais des tâches de prêtresse. Les seules choses qui attiraient mon attention étaient les dagues sacrificielles utilisées dans nos rituels. Je les trouvaient si belles, si puissantes…si destructrices.

J’étais trop jeune et n’avais pas l’expérience nécessaire pour célébrer les rituels qui m’auraient permis de m’en approcher davantage. Mais la tentation était si forte, qu’un jour je me faufilai dans la salle de l’autel où se trouvaient les dagues, pensant ne pas être vue. Mais la Mère-Matronne du clan, Etyla, à la tête de nos prêtresses, m’avait suivi et m’interpella au moment où j’allais enfin atteindre mon but, prête à saisir l’arme sacrée.

Je fus bien évidemment punie : elle me rétrograda en me faisant faire les tâches auxquelles des plus jeunes que moi étaient assignés habituellement comme nettoyer les robes des prêtresses ou encore les marches du Temple.

A ce moment là, je pensais que ma fascination pour les dagues était due à mon dévouement à Lith et à ma volonté de gravir les échelons parmi les prêtresses car pour moi ces armes sacrées étaient le symbole de la puissance divine. La punition qui m’avait été infligée était pour moi humiliante. Je m’y étais résignée gardant ma colère enfouie au fond de mon cœur.

Publié : 13 juil. 2007, 11:48
par Kharya
Quelques fingeliens plus tard, alors que j’arpentais les longs couloirs sombres de nos cavernes pour me rendre au Temple, mon oreille fut attirée par des tintements de métal. D’une pièce adjacente émanait la lumière d’un brasier : la Forge du clan. Je ne pu résister à l’attrait du métal, n’hésitant que peu de temps en pensant aux sanctions que je subirais pour m’être écartée de mes tâches.

Je me faufilai vers l’entrée de la salle, mais fut interceptée par un mâle du clan. Je le reconnu immédiatement à sa grande taille pour un mâle, son regard glacial et ses cheveux roux comme les miens. Mon père Ashonn. Il me toisait de toute sa hauteur et son regard méprisant changea subitement en surprise. Il se mit à guetter les alentours.

« Viens avec moi Kharay. »


Il me fit signe de le suivre et nous empruntâmes la portion de couloir menant à la forge.

« J’ai appris la raison pour laquelle la Mère-Matronne t’avait sanctionné…Je comprend ton intérêt pour les armes…Plus jeune j’aurai voulu être forgeron, mais Lith avait besoin de moi dans l’ombre, ma dague dans le dos de ses ennemis…Je vais te montrer ce qu’est forger. Mais j’espère que cela te découragera. Il te faut suivre Lith, tu dois devenir Prêtresse. »

Sa voix grave, qui semblait faire vibrer la pierre, se tut au moment où nous arrivâmes dans la grande salle qu’était la Forge. L’air y était extrêmement chaud, des quantités d’armes reposaient dans des présentoirs contre les parois de droite, alors qu’à gauche étaient stockées les matières premières. Au fond se trouvait l’immense foyer alimenté en continu par des bûches de bois pour en maintenir la température. Deux forgerons et trois apprentis s’y affairaient.

« N’as-tu donc pas compris, Ashonn ? Les dagues de la guilde ne sont pas encore prêtes ! Et tu viens à peine de partir ! » Rugit l’un des Elfes Noirs.

Son regard sombre darda sur mon père un regard furieux, avant de croiser le mien. Il laissa son ouvrage inachevé et s’avança vers nous. L’un des apprentis vint immédiatement prendre son relai. Je sentais monter en lui de l’inquiétude.

« Que fait-elle ici, Ashonn ? Ce n’est pas un lieu pour les femelles. » fit-il d’une voix cinglante.

« Je veux qu’elle s’en rende compte elle-même. Les punitions de la Mère-Matronne ne semblent pas l’y aider.»

Je le regardai avec effronterie en croisant les bras pour asseoir mon aplomb. Ce qui bien sûr compte tenu de mon jeune âge devait lui sembler bien pathétique.

« Je ne veux pas d’elle dans ma Forge…Elyda et la Guilde sont déjà trop regardant sur mon travail. Détourner une femelle de Lith me vaudrait le bannissement. Partez ! »

Il regarda mon père avec détermination, pendant plusieurs minutes, jusqu’à ce que celui-ci décide qu’il était temps de partir.

Quand à moi je regardai une dernière fois ce lieu et ceux qui s’y trouvaient.
« Je reviendrai…Oui, je reviendrai… » pensai-je. Un sourire empli de démence s’afficha sur mon visage, je venais de trouver un moyen, mais ce ne serait pas avant quelques temps.

Publié : 16 juil. 2007, 11:46
par Kharya
Je suis restée obéissante quelques mois, presque un fingelien, avant de mettre mon plan à exécution.

Ma visite à la forge n’avait pas été découverte, mais mon retard à l’office de Lith s’était fait remarquer bien que je ne reçu aucune sanction.

Parmi les apprentis forgerons l’un d’eux avait attiré mon attention. Il était d’un ou deux fingeliens plus âgé que moi et se nommait Zorehn. Il était de bonne carrure, la forge réclamant une certaine force physique en plus d’une grande habileté manuelle.

J’avais ressenti en lui un manque d’assurance, faille que j’avais décidé d’exploiter pour le manipuler.

Je m’étais arrangée depuis quelques semaines pour le croiser au moins une fois par lune, lui lançant des regards aguicheurs. J’avais appris des Sœurs aînées, et notamment de ma mère, Nalym, les différentes manières de mener les mâles. La séduction en était une.

En peu de temps Zorehn s’était mis à éviter mon regard. C’était le signe que bientôt la deuxième phase de mon plan allait se mettre en place. J’allais me rapprocher davantage. Cependant il me fallait être discrète pour ne pas être vue par les Sœurs qui remarqueraient mon petit jeu au premier coup d’œil.

Alors que le jour dardait ses rayons à l’extérieur des caverne, moment où nombre d’entre nous étaient en sommeil, je me décidai à m’introduire dans les quartiers des mâles, séparés des nôtres par quelques couloirs sinueux.

Je cherchais le dortoir des apprentis forgerons. Dans notre clan les différentes classes étaient systématiquement séparées les unes des autres. Pour le trouver je me fiais à mon instinct et mon odorat. Les forgerons avaient une odeur qui les différenciaient des autres elfes noirs : l’odeur du sang ennemi était beaucoup plus faible et celle du feu omniprésente.

Une fois que je l’eusse trouvé, je me faufilai à l’intérieur et, ayant repéré Zorehn, m’approchai sans bruit. Il était allongé sur une épaisse couverture en peaux d’ours, et ne portait qu’une simple chemise bleue sombre longue jusqu’à mi cuisse.

Je me penchai au dessus de lui et mordillai son oreille droite. Comme prévu il se réveilla très surpris de me retrouver sur sa couche.

Et avec un sourire charmeur je lui dis :

« Montre moi la forge, et je serai tienne pour tous les jours à venir… »

Il tenta de m’embraser. Je l’esquivai, me relevai et arrivai déjà près de la sortie. Il se mit debout d’un bond et me suivit sans prendre le temps d’enfiler un pantalon.

Il était rare qu’un forgeron puisse espérer toucher une femelle destinée à Lith, sauf si celui-ci excellait dans son art et avait été d’une très grande utilité pour le clan.

Il me suivit sans un mot jusqu’à l’entrée de la Forge. Celle-ci était gardée par un sceau magique que seul les forgerons savaient désactiver. Il effectua l’incantation puis quand il eu finit me fit signe de le suivre.

Le feu n’était plus fait que de quelques braises. Zorehn m’expliqua qu’un apprenti venait régulièrement y rajouter du bois pour qu’il ne s’éteigne jamais complètement. Par chance s’était lui qui devait s’en charger pour la prochaine relève qui avait lieu quelques heures plus tard.

Il me dévorait du regard alors que je parcourais la salle observant attentivement toutes la productions et les outils ayant servit à la fabriquer. Je posais de nombreuses questions auxquelles il ne parvenait pas toujours à répondre. Comme il le disait il n’était qu’un apprenti.

Il s’approcha de moi, qui dos à lui continuais d’observer ce qui m’entourait, et il m’enlaça avec force. Je me dégageai promptement avec un regard hautain. Cela ne le découragea pas.

« Une promesse doit être tenue, Kharay, tu es à moi désormais ! »

Je lui souriais avec effronterie. Et sans un mot je quittai la Forge.

Mais la chance n’était pas avec moi, alors que je me précipitais dans le couloir, je me retrouvai nez à nez avec le maître forgeron…

Publié : 03 août 2007, 19:11
par Kharya
Le maître forgeron me toisait d’un regard froid en croisant ses bras musclés. Je restais figée, incapable de bouger. Je n’avais aucune idée de ses intentions.

J’entendis Zorehn se rapprocher, puis s’arrêter net à quelques mètres. Les yeux du forgeron se reportèrent sur son apprenti, toujours à demi-nu.

Il me saisit le bras avec poigne et attrapa également celui de Zorhen avant de nous entraîner dans les couloirs sombres du sombre dédale qu’était la caverne de notre clan.

« La Mère-Matronne ne va pas apprécier de voir l’une de ses disciples fricottant avec un simple apprenti forgeron ! » lança t-il avec rage.

Il avançait à grands pas et ils atteignirent rapidement l’entrée du palais des Vestales de Lith, accolé au Temple. Zorehn parvenait difficilement à contenir sa panique. Quand à moi je marchais tranquillement. Une punition de plus ou de moins…Cela m’importait peu car ma mission était réussie.

La prêtresse gardant l’entrée nous regardait approcher avec intrigue. Elle était du même rang que ma mère et se nommait Hyérinn. Nous arrivâmes devant elle. Le Maître Forgeron lui expliqua la situation, maintenant toujours sa prise sur nous. Elle me toisa avec mépris. C’était une Soeur aux cheveux noirs teintés de reflets bleuté, son regard à l’iris d’or était perçant et me donnait l’impression qu’elle voulait lire mon esprit pour comprendre pourquoi j’avais agit ainsi.

Hyérinn ouvrit la porte recouverte de métal sombre portant des bas reliefs aux symboles de Lith. Elle disparu quelques minutes. Le Forgeron bouillonnait de fureur. Cela se voyait à ses sourcils froncés et à sa crispation sur nos bras de jeunes elfes noirs.

Je réprimais un n-ième baillement quand Hyérinn reparu.

« La Mère-Matronne t’attend, Kharay » fit-elle toujours méprisante. « Quand à lui mène le à la Chambre des Pécheurs, Fherzel… »

Zorehn voulu protester mais une pression supplémentaire sur son bras l’en dissuada. Le Maître Forgeron me relâcha et je suivis la prêtresse dans le Palais des Vestales.

Zorehn me regardait. Ses yeux exprimaient tour à tour la haine, l’indignation et la demande de pitié. La Chambre des Pécheurs servait généralement en cas d’attente de décision de la Mère-Matronne concernant un acte prohibé…Et menait toujours, à ce que j’en avais vu, à l’exécution du pécheur, bien que la sentence puisse être donnée sous des formes variées, en fonction de la gravité du crime.

Je sentais un étrange sentiment en moi…Je ne savais pas quel mot lui donner…Ce ne fut que bien plus tard, en ayant quitter le clan, que je su que ce jour j’avais ressenti du remord et de la culpabilité…

Publié : 13 août 2007, 12:18
par Kharya
Selon l’enseignement qui nous était donné dans nos premières années, le Temple de Lith avait été érigé quatre générations plus tôt, soit pour des elfes noirs il y a environ cinq cents fingeliens. Il se trouvait au plus profond d’une faille de la montagne abritant les cavernes de notre clan. Cet endroit avait été découvert après l’explosion d’une paroi par un sort servant à l’agrandissement des galeries.

La Mère-Matrone d’alors avait décidé d’utiliser la paroi naturelle très haute pour y installer un temple et par sa magie elle plaça une protection qui permettait de renvoyer au soleil ses rayons détestables et de cacher la présence du Temple.

Le Temple de Lith du clan Norhen Dagha avait été sculpté et aménagé par la magie creusant la pierre. La façade faisait environ neuf mètres de haut pour sept mètres de large. Elle était ornementée de bas reliefs et de statues d’araignées et de serpents. La porte à double battant, imposante dans sa taille de trois mètres sur deux et demi, était faite d’un métal lourd et sombre. Fermé, on pouvait y voir gravé le symbole de Lith, l’araignée aux pattes déployées. Elle était protégée par la magie des Prêtresses, ce qui la faisait luire d’un halo verdâtre.

Le Palais des Vestales de Lith avait été construit bien plus tard sur la même paroi. Il était bien moins imposant et ses entrailles étaient constituées de réseaux de longs couloirs donnant sur les chambres des prêtresses et des jeunes vestales. Au contraire, le temple ne possédait guère plus qu’une gigantesque salle centrale servant aux rituels, annexée de trois petites salles, la première étant un vestiaire pour les prêtresses officiant et la seconde une salle de préparation des disciples. La troisième se nommait la salle d’offrandes.

Je me suis toujours demandée pourquoi cette pièce portait ce nom car y étaient entreposés non pas des offrandes mais les butins de valeur pillés lors des attaques de la gilde des assassins. La Mère-Matrone les désignaient comme offrandes à Lith alors que ces prises servaient en réalité au commerce avec les autres clans d’elfes noirs.

Le Palais des Vestales abritait la quasi-totalité des femelles du clan. Seules les jeunes vestales sur le point d’être promues prêtresses n’y vivait pas. Cela avait pour but de les familiariser avec les mâles : les observer et comprendre leurs réactions, car comment peut-on diriger si on ne connais pas son peuple ? A cette période c’était mon cas. Je devais subir le rituel du serment quelques fingeliens plus tard.

Mais revenons sur ce qui m’attendait chez la Mère-Matrone…

Publié : 20 août 2007, 19:41
par Kharya
Je suivais tranquillement mon aînée Hyérinn dans les couloirs du Palais. Nous ne disions mot et aucun geste n’évoquait de communication. Je vis ma mère Nalym au loin. Elle avait été promue depuis peu à l’intendance de la Mère-Matronne et accueillait ceux avec qui elle avait à s’entretenir. Nalym était donc au courant de tout et c’était à elle de décider si un sujet méritait d’être porté au jugement de la Mère-Matronne.

Elle me toisa d’un regard froid avec ses yeux violets – qui d’ailleurs était la seule ressemblance physique que j’avais avec elle. Ses cheveux étaient d’un noir ébène et les traits de son visage plus ronds que les miens, qui avaient la finesse de mes aïeules paternelles. La Mère-Matrone m’avait également souvent reproché le caractère borné que j’en avais hérité. Personnellement le terme déterminée me semble plus approprié.

« Tu as une fois de plus été écartée de ton Destin, Kharay, la Mère-Matronne ne sais plus que faire pour t’y ramener… » Le ton de sa voix était posé mais ses yeux dardaient sur moi sa colère. « Elle t’attend…Pour t’annoncer sa décision. »

Une décision. La Mère-Matronne n’attendait jamais une explication ou une justification. Elle prenait les faits, les analysait et ensuite sanctionnait. Personne ne pouvait intervenir dans ses choix.

Nalym ouvrit la porte à double battant en métal noir menant aux quartiers de la Mère-Matronne. Elle m’ordonna d’entrer d’un geste sec de la main.

La salle était obscure avec quelques bougies délimitant la forme du mobilier par des ombres dansantes. La Mère-Matronne m’observait assise dans son fauteuil à haut dossier. Sa joue reposait contre son poing et de son autre main elle jouait avec une dague luisante.

« Kharay…Tss…La forge n’est pas un art noble pour toi. Je vais être indulgente pour cette fois, car tu as fort bien utilisé mon enseignement pour obtenir ce que tu voulais…Mais au prochain écart, ce sera finit. »

Elle me regardait attendant ma réaction. Je lui renvoyais un regard indifférent, ce qui bien sur était une provocation. Elle fronça les sourcils devant tant d’impertinence et se leva impérieusement.

« Tu es à présent assignée au service des mâles de la guilde. Ils t’ordonneront et tu obéiras, comme tu obéis à Lith ! Voila ta sanction. Tu seras considérée comme un vulgaire jeune mâle. Ainsi tu apprendra que ta place est parmi les prêtresses : en haut de la hiérarchie ! Maintenant sors ! » déclara t-elle du ton de l’énervement.

Au moment où je refermai la porte je croisai les regards des prêtresses présentes dans l’antichambre : ma mère, Hyérinn et deux autres, probablement venue suite à la nouvelle de ma sanction. Elles me toisaient toutes avec un mépris semblable à celui qu’elles réservaient aux mâles, bien qu’étant encore plus dur.

« Sors d’ici et vite…Ashonn t’attend dehors » me lança sèchement Nalym.

J’obéis. Je ne savais pas encore quoi penser de ce qui venait d’arriver.

Publié : 10 sept. 2007, 11:41
par Kharya
Le clan Norhen Dagha comptait deux organisations d’assassins : la Gilde des Dagues Noires, ne réunissant que des mâles, et la Toile de Lith formée par des prêtresses.

La Gilde des Dagues Noires était composée de deux corps : la Gilde Première spécialisée dans les assassinats et autres attaques et la Gilde Seconde apportant soutien magique et ravitaillements en cas de longue campagne d’affrontement.

Le chef de la Gilde des Dagues Noires n’était soumis qu’à l’autorité de la Mère-Matrone et des Hautes Prêtresses du Premier Cercle, les plus élevées dans l’ordre matriarcal et qui sont aussi protectrices de la représentante de Lith.

Ce privilège avait été accordé par l’ancienne Mère-Matrone voyant baisser l’efficacité et l’ardeur au combat des mâles. Une telle récompense visait à leur donner un but à atteindre et encourageait la reprise de l’entraînement ce qui favoriserait le retour des performances par cette impression de liberté donnée de ne pas plier devant toutes les femelles.

Cependant les Hautes Prêtresses du Second Cercle peuvent émettre des suggestions au chef de Gilde, qui sont suivit par un ordre de confirmation venant du Premier Cercle. Ce qui finalement revenait à la même chose qu’un ordre direct. « Un signe de la stupidité des mâles. Se faire ainsi berner ! » avais-je entendu commenter la Mère-Matrone alors qu’une prêtresse était en train de nous enseigner cette partie de notre histoire.

Les Hautes Prêtresses du Premier Cercle étaient issues d’une des deux factions de la Toile de Lith : le Venin de Lith, regroupant les manieuses de dague et les nécromanciennes, ma mère étaient de celles là ; et le Feu de Lith., formé par les sorcières noires. Ces deux factions étaient dirigées par les Hautes Prêtresses du Second Cercle.

La Toile de Lith représentait l’élite des prêtresses et ne se déplaçait que pour les missions de grande importance ou en renforts si les effectifs de la Gilde des Dagues Noires étaient insuffisants. Ce qui était arrivé deux ou trois fois en huit cent ans lors de conflits de territoire avec les autres peuples.

Publié : 17 sept. 2007, 22:55
par Kharya
Contrairement aux autres communautés d’elfes noirs, le clan Norhen Dagha n’utilisait pas la Gilde pour les assassinats dans le cadre des luttes de pouvoir entre familles nobles car de telles familles n’existaient pas. Dans notre fanatisme à suivre Lith, notre organisation dépendait entièrement de la représentante de la Déesse-Mère : la Mère-Matrone, dont la succession se faisait de mère en fille.

Depuis la fondation du clan aucun couple n’avait été créé, le mariage une chose bannit de nos traditions, pour laisser place aux unions d’une nuit visant uniquement à la pérennité de notre peuple. La Mère-Matrone choisissait les couples de façon élitiste pour que les enfants à venir soient les plus prometteurs.

Je comprend mieux aujourd’hui, après les durs moments que j’ai vécu, le but de ces séparations permanentes entre mâles et femelles : éviter les sentiments. Les sentiments sont instables et peuvent nous éloigner de notre nature. Bien que la déception sentimentale puisse nous plonger dans les ténèbres auxquelles nous appartenons, nous elfes noirs, le fait d’avoir déjà éprouvé ces sentiments mièvres, comme l’amour, nous plonge dans une lutte démoniaque et irraisonnée. Il vaut mieux, Soeurs et Frères noirs, éviter de connaître ce qui est nommé « bons sentiments » si vous ne voulez pas voir venir la folie.

Tel est aujourd’hui la leçon que je tire de ce que fut l’enseignement d’Etyla. Mais à présent il est trop tard pour moi. Mon coeur ténébreux est perverti et mon âme sombre affaiblie. Pourtant je continuerai de lutter. Jamais le sang noir ne renonce...

Trêve de divagations, revenons à mon histoire...

Après être sortie du Palais des Vestales, je suivis Ashonn jusqu’aux couloirs de la Gilde et débuta alors mon labeur de jeune mâle apprenti de la Gilde...

Publié : 25 sept. 2007, 22:52
par Kharya
J’étais logée dans une chambre commune que je partageais avec trois jeunes mâles dont mon jeune frère par le sang de mon père. Ils étaient tous trois âgés d’environ trente fingeliens de moins que moi.

Notre premier travail en tant qu’apprenti était de cuisiner et de servir les repas aux membres de la Gilde.

Dans un second temps, une fois nos corvées ménagères effectuées, nous prenions soins des armes et armures que les combattants acceptaient de nous confier. Les moments de temps libres étaient mis à profit pour observer les entraînements des aînés.

C’est ce que je fis durant près de trois fingélien, avant que le chef de Gilde, bien qu’ayant reçu l’ordre de la Mère-Matrone de ne me donner que des tâches ingrates de débutants, choisisse de m’assigner à la salle de torture, auprès des spécialistes de la quête d’informations.

Jusque là j’avais trouvé intéressant d’observer ce milieu sombre et discret. Je m’y sentais bien mieux que parmi les prêtresses ne parlant que par Lith, de Lith et en l’honneur de Lith. Seuls les regards m’étaient parfois pesants. Bien qu’étant censés me considérer comme l’un de ces jeunes apprentis venant d’intégrer la Gilde, je remarquais un mépris inhabituel, certaines fois de la crainte, et assez souvent un pétillement lubrique comme s’ils s’attendaient à ce que je les serve dévêtue. Ces derniers détournaient systématiquement les yeux quand Ashonn passait près d’eux, les toisant avec un regard menaçant.

Depuis que j’avais été assignée à la salle de torture de façon permanente, ce genre de regards se faisaient rares. Probablement parce que tous ces jeunes mâles n’étaient pas assez haut gradés pour y avoir accès. Ou bien parce que les assassins s’y afférents étaient pour la plupart des amis de mon père. Je le soupçonnais d’ailleurs de ne pas être innocent dans ce changement. Je savais qu’il entretenait de bonnes relations avec le chef de la Gilde, qu’il avait sauvé à plusieurs reprises en mission.

Tout était si différent de la vie parmi les prêtresses. Pas une once de camaraderie, pas de plaisanteries, pas de rire. Là bas tout était froid et strict. Alors qu’ici...Ici je m’y sentais à ma place. Je pouvais observer à loisir ces productions destructrices venues de la forge. Tenter de les manier.

Comment la Mère-Matrone avait-elle pu se tromper à ce point sur l’effet que produirait ce qui pour elle était une sanction ? Certes les premières corvées avaient été dégradantes, mais pas davantage que celles que j’avais toujours eu à faire dans mes premières années d’apprentie prêtresse. Vivre chez les mâle était si intéressant que tout ce qui apparaissait désagréable était atténué dès que mes yeux croisaient une lame.

Publié : 04 oct. 2007, 20:58
par Kharya
A mon nouveau poste je côtoyais toutes les nuits et parfois en journée les prisonniers de raids des assassins de la Gilde Première. Mon travail en ce lieu consistait à préparer le matériel nécessaire aux interrogatoires et éventuellement à nourrir les prisonniers si on m’en donnait l’ordre, afin que ceux-ci ne meurent pas prématurément. Les membres de la Gilde pouvaient passer plusieurs mois à torturer un prisonnier même si celui-ci n’était plus d’aucune utilité. La jubilation de voir sa souffrance suffisait à justifier son maintient en vie.

La majorité des prisonniers étaient elfes pâles. Parfois menés ici pour la recherche d’informations ou pour un sacrifice mineur, Lith ne se satisfaisant que de notre sang noir. Les geôles de la salle de torture n’étaient jamais vides. Et par mes observations j’avais pu remarquer qu’en réalité la majorité des prisonniers n’étaient ici que pour divertir par leurs douleurs les assassins de la Gilde.

Il arrivait quasi systématiquement qu’en me voyant ces prisonniers sans honneur me suppliaient ou me soudoyaient pour sauver leur vie. Ceux là je les ignorais en ricanant. Me prenaient-il pour une simple jeune servante sans cervelle ? Je les trouvais pathétiques.

Que pouvaient-ils m’offrir que je n’avais déjà ? A cette question l’un d’eux me répondit un jour : « La joie, l’Amour, la Lumière ! »

Je me souviens bien de cet elfe pâle, mais plus encore de son compagnon de geôle qui jusque là n’avait dit mot. Au fond de la cellule il avait patienté en m’observant durant les nombreuses semaines de sa captivité. Il ne semblait craindre ni la torture ni la mort. C’était la première fois que je voyais un pâle avec autant de dignité.

Ce jour là, suite à la réponse vaine de son compagnon il s’était levé et rapproché posant une main sur son épaule.

« Laisse là, les elfes noirs ne sont pas fait d’un métal qui puisse être fondu si facilement. »

Je m’étais figée, le regard méfiant et cependant intéressé.

« Vous êtes forgeron ? » demandais-je impérieusement.

« Votre esprit est aiguisé, jeune elfe... »
répondit-il avec un léger sourire au coin des lèvres.

Dans ma tête bouillonnait l’envie de lui demander de m’apprendre cet art en échange de sa libération. Mais me remémorant ses réactions sous la torture je m’étais ravisée. Je savais qu’il n’accepterait pas.

« Je croyais les femelles de ce clan de fière combattantes, nécromanciennes ou sorcières, mais pas forgeronnes... » dit-il en me regardant avec provocation.

« Il n’y a que des forgerons. Quand à moi je serais prêtresse de Lith comme il se doit. Vous observez bien mal les choses, le pâle. » répondais-je avec impulsivité sans avoir contrôlé le ton de ma voix ni l’expression de mon visage. Ce qui laissait voir mon trouble. Je m’en étais aperçu en voyant le sourire du prisonnier s’agrandir.

« Je connais un lieu où tu n’auras plus à subir ces traditions, où tu auras ta liberté...Va vers le sud, jusqu’aux côtes, et cherche le plus grand port. Là bas se trouve un navire qui vogue vers une grande île nommée Séridia...Là bas tout est vierge et sauvage. Tu pourras y être qui tu souhaites devenir, sans personne pour t’en empêcher...mais il te faudra force et patience pour y arriver... »

Je restais plantée au milieu de la salle, buvant ses paroles, incapable de bouger ou d’entendre les assassins en charge des interrogatoires entrer.

« Eh bien Kharay ! Active-toi ! Où sont les outils ?! »

Je sursautais et me mis avec célérité à préparer la table de torture.

Etre libre... ?

Publié : 10 déc. 2007, 00:01
par Kharya
Deux fingeliens après la mort de l’elfe pâle, j’atteignais mon centième anniversaire. Quelques jours avant la date exacte, je reçu la visite d’Etyla, la Mère-Matrone, alors que je commençais mes corvées dans la salle de torture.

« Kharay, il est temps pour toi de retrouver la dignité de ton rang. La punition a été longue et déshonorante. Mais Lith veut ton serment d’Adoration. Bien que tu ne sois plus en âge pour cela. »

En effet le rituel de l’Adoration, permettant aux jeunes disciples de devenir Prêtresses, s’effectuait à la date de la majorité, soit 80 fingeliens dans mon clan.
Cette nouvelle aurait du me rendre fière, mais je m’étais habituée au contact des mâles. Il m’arrivait à présent de chahuter avec mes trois compagnons de chambre comme le faisait la plupart des jeunes mâles. D’ailleurs, j’étais acceptée de la même façon que l’un d’entre eux aux yeux de toute la Gilde. Cependant mon esprit était bel et bien resté celui d’une femelle, gardant son pragmatisme et sa faculté à manipuler autrui, bien qu’à présent entaché de sentiments : l’amitié envers mes camarades, la haine des autres peuples, la colère contre les Prêtresses. Ma curiosité pour le monde extérieur s’était également accrue à force d’entendre les confessions des prisonniers.

Etyla m’ordonna de la suivre sur le champ dans le Temple de Lith. Dans les couloirs, je croisai les assassins et les aspirants de la Gilde. J’avais tissé des liens de respect ou d’amitié avec la plupart. Mon regard se fixa sur mon jeune frère et mes camarades de chambre. A ce moment, j’eu l’impression que ce serait la dernière fois que le verrai. Une lueur dans ses yeux dénonçait qu’il éprouvait la même chose. J’en fus troublée. J’avais appris à connaître mon frère. Comme moi, il avait ce regard déterminé et ce caractère fort qui me faisaient craindre qu’un jour il subisse de lourdes sanctions. Je passai devant lui sans mot dire mais je savais qu’il lisait en moi « Adieux, petit frère. »

Publié : 05 févr. 2008, 20:27
par Kharya
Au dernier croisement avant l’arrivée au Temple, je vis Ashonn apparaître à deux mettre de notre groupe. L’espace d’un instant je vis sur son visage de l’inquiétude, qui céda vite place à un air impassible d’assassin.

« Suis-je donc si importante ? Pourquoi tous autour de moi me sont-ils aussi attachés ? L’absence de sentiments n’est-elle pas la base de notre éducation à tous? »

Ashonn, fusillé du regard par la Mère-Matrone, s’écarta promptement du passage. Etyla, ses prêtresses et moi nous arrêtâmes devant la grande porte du Temple. Nalym, ma mère, nous y attendait et me toisa avec sa froideur habituelle. Sans doute devait-elle ressentir la honte d’avoir mis au monde une aberration telle que moi. Encore un sentiment. La haine.

« Kharay, tu vas suivre Nalym qui te parlera du déroulement du rituel et te préparera à le recevoir » déclara Etyla avant de rejoindre avec son escorte le Palais des Prêtresses.

J’étais à présent seule avec ma mère. Elle me tourna le dos et longea le temple vers le côté pour y entrer par une porte étroite. Je la suivis. Mon instinct me mettait en garde. De plus il était absolument illogique que je puisse être acceptée comme prêtresse sans avoir reçu un enseignement complet de disciple. Mais à quoi bon fuir ? Je me trouvais au plus profond des cavernes du clan. Jamais je ne pourrai en sortir sans autorisation. Bienque n’étant pas résignée à mourir je décidai d’affronter ma destinée. Lith est seule juge de mes actes !

Re: Dans l'ombre de la Lune...

Publié : 20 oct. 2009, 19:43
par Kharya
Nalym me mena dans uen petite salle faiblement éclairée par un brasero. Elle m’expliqua, sans jamais me regarder en face, ce que je devais faire.

« Tes lacunes en ce qui concerne les rituels sont immenses. Je suis donc obligée de te résumer celui qui va se dérouler puisque Lith demande ton âme à travers la voix d’Etyla. Saches que comme dans tout rituel, Lith peut choisir de te rappeler à elle si elle te juge inapte à la servir dans le Monde du Dessus. Tu devras prêter serment. Retiens ces mots, je ne les répéterais pas :

Moi, Kharay, humble créature à laquelle vous avez permise de vivre, vous offre mon âme, Sublimissime Déesse-Mère. Je m’engage à vous servir dans la Vie et dans la Mort, Vôtre pour l’éternité dans une absolue loyauté. J’accepte en moi votre puissance et vous fait don de mon sang, dont l’impureté sera lavée par votre Volonté. Gloire à Lith !

Pour cette dernière phrase, tu recevras le venin sacré dans ton bras gauche et tu t’entailleras le bras droit avec la dague rituelle. C’est tout ce que tu as à faire. C’est d’une simplicité extrême alors ne te couvre pas de ridicule. Tu rattraperas ton retard de disciple plus tard, si tu survis. »


A ce moment, elle me regarda avec une expression neutre. Un frisson d’effroi me parcouru l’échine. Ma propre mère semblait envisager ma mort sans une once d’inquiétude ou de regret. Juste une indifférence cachant peut être du soulagement. Elle m’indiqua un baquet d’eau derrière moi, maugréant que j’empestais le mâle, et m’ordonna de me déshabiller pour me laver avant d’enfiler une robe de cérémonie posée sur une chaise dans un coin de la pièce.

Elle me laissa seule. L’eau était glacée. Mon corps s’habitua peu à peu à la température pendant que mon esprit vagabondait entre la récitation des paroles du rituel et mes interrogations sur le Destin. Une question revenait toujours me hanter : Pourquoi suis-je ici ? J’avais toutes les raisons de vouloir quitter cette salle et de fuir le clan. La première étant que je ne voulais pas être prêtresse. Mais quelque chose me retenait. Une impression étrange qui faisait que je voulais voir Lith. La voir et lui poser cette question. Les Prêtresses qui enseignaient aux disciples avaient toujours dit que l’Adoration était le premier contact d’une femelle avec la Déesse-Mère.

Je sorti du bain et me séchais en vitesse, ne sachant pas quand reviendrai ma mère. J’enfilais la robe ample de tissu noir grossièrement cousu. Je me souvenais plus jeune d’avoir vu des disciples les porter mais je ne me souvenais pas du reste de la célébration, normalement réservée comme tout rituel aux Prêtresses. J’avais encore dû être trop curieuse et pas assez discrète. Je m’asseyais sur la chaise en attendant que l’on vienne me chercher, ressassant mes souvenirs de disciple dissipée.

Re: Dans l'ombre de la Lune...

Publié : 20 oct. 2009, 19:47
par Kharya
La porte s’ouvrit, Nalym apparue en tenue rituelle : une longue robe noire parfaitement ajustée à sa fine silhouette, brodée de fils d’argent évoquant une toile d’araignée, avec un décolleté plongeant mettant en valeur ses atouts féminins. Elle portait une ceinture d’argent finement travaillée d’entrelacs complexes avec un fourreau pour sa dague rituelle. Son visage était masqué par un voile de soie arachnéenne noire. Elle me fit signe de la suivre et nous quittâmes la petite pièce.

Nous entrâmes dans la grande salle du Temple. L’immense sculpture représentant la Déesse-Mère au corps d’araignée et buste d’elfe noire écrasait d’une puissance maléfique l’atmosphère de la pièce. L’Autel avait été dressé après avoir été lavé par le sang et le venin. Y étaient posés un calice d’or et d’emeraudes, le Dard de l’Araignée et la Dague Noire d’Etyla qui serviraient pour le rituel. Toutes les Prêtresses étaient présentes. Etyla attendait du haut des trois marches qui permettait d’atteindre l’Autel. Je fus accompagnée jusqu’à elle par ma mère.

« Kharay, fille de Nalym, te voici en âge de servir Lith. Ta Naissance a été acceptée par la Déesse-Mère. Elle a ensuite guidé tes pas vers elle. Cette Nuit, elle te jugera sur tes actes et décidera de ton utilité.
Kharay, à présent donne toi à Lith ! Que ton âme lui appartienne pour l’avènement de son règne ! »


Etyla empoigna le Dard, sorte de pieux creux très défilé en or et le trempa dans le venin contenu dans le calice. Elle me fit tendre mon bras gauche et me piqua en profondeur, laissant le liquide mortel se répandre. J’entamai alors la récitation du serment avec une ferveur surprenante.

« Moi, Kharay, humble créature à laquelle vous avez permise de vivre, vous offre mon âme, Sublimissime Déesse-Mère. Je m’engage à vous servir dans la Vie et dans la Mort, Vôtre pour l’éternité dans une absolue loyauté. J’accepte en moi votre puissance et vous fait don de mon sang, dont l’impureté sera lavée par votre Volonté. Gloire à Lith ! »

Je saisis fébrilement la Dague Noire tendue par Nalym. Le venin avait commencé son office destructeur. D’un geste rageur, je m’entaillais le bras droit. Je sentais mon sang bouillonner et mes forces m’abandonner. Mes jambes cédèrent sous moi. Puis plus rien. Plus de sens, plus de pensées, plus qu’un raisonnement irréel de clameurs. « Gloire à Lith ! Gloire à Lith ! »

Je me réveillai trois jours après, affalée sur l’Autel. Vivante, mystérieusement. Nalym était auprès de moi, sur les marches, portant toujours son vêtement de cérémonie. Elle se leva et se tourna vers moi quand elle m’entendit bouger. Nous étions seules. Elle me fixait avec mépris.

« Tss…Tu te réveilles alors que l’astre maudit est à son zénith. Mauvais présage ! Lith semble avoir d’étranges projets pour toi pour te laisser sur ce monde. Tu n’es pas normale ! Ton évolution est anarchique ! Qui es tu donc, toi que j’ai extrait du Néant ?! »

Ses yeux brillaient d’un éclat étrange. De l’interrogation ? Du doute ? Non…de la peur ! Elle me tendit un vêtement et quitta le Temple rapidement. Quand la porte se referma derrière elle et que je fus seule, je me tournais vers la statue divine. Je fixais le regard de pierre avec toute ma détermination.

« Je serai utile, Lith, mais pas comme Elles. »

Re: Dans l'ombre de la Lune...[inachevé]

Publié : 08 avr. 2010, 11:23
par Kharya
J’avais repris une vie normale au sein des Prêtresses, comme si jamais je n’avais été écartée de mon Destin. La lassitude était omniprésente et presque insupportable. Etyla avait eu raison au moins sur un point : je m’étais assagie. Mes connaissances sur les mâles de la Gilde avaient été exploitées par les Prêtresses du Premier Cercle. J’avais cependant omis certains détails pour éviter à mes anciens camarades des sanctions inutiles à mes yeux.

Mes moments de méditation étaient hantés par le souvenir du discours de l’elfe pâle sur cette fameuse île de Séridia où je pourrai être moi même. Je savais que poser des questions aux femelles n’aurait pas de résultat satisfaisant. Par contre, mon rang me permettait d’accéder à la petite bibliothèque du Palais des Vestales. J’y passais mon temps libre à chercher des informations sur ce qu’il y avait à l’extérieur.

Je ne trouvai rien sur cette nouvelle terre, mais de nombreuses informations sur les autres clans d’Elfes Noirs s’offraient à moi. Je les lisais et les relisais avec avidité, comparais les dates, ce qui me permis de soulever quelques manques ou incohérences. N’écoutant que mon courage, ou ma témérité, je m’étais lancée à l’assaut du bureau de la Mère-Matrone pour demander audience afin de soulager mes interrogations.

J’obtins une entrevue, qui dura le temps de finir de poser ma question avant de prendre fin dans un rugissement menaçant qui me poussa très vite en dehors de la pièce. Voyant une telle réaction, je savais que le seul moyen d’obtenir des réponses était d’aller jouer de mon affection de fille auprès d’Ashonn. Je me mis donc en quête dans les couloirs du clan pour le localiser.

Je le retrouvai dans la salle d’entraînement, assis en tailleur à observer les leçons données par le chef de la Gilde Première. Quand il me vit, il bondit sur ses deux jambes et me prit par le bras pour m’amener dans un endroit plus convenable pour bavarder. C’était une salle relativement petite, pourvu de mobilier rudimentaire : une paillasse, une table et une chaise ainsi qu’un râtelier d’arme et armure.

Je lui expliquais ce qui m’intriguait, à savoir ces informations sur les autres clans recueillies en très grand nombre durant une période relativement courte, environ une vingtaine de fingeliens. Puis, plus rien. Comme si tout contact avait été perdu.

Mon père affichait une mine inquiète au fur et à mesure de mes dires. Il regardait tout autour de nous et alla même vérifier le couloir. Puis il vint se placer devant moi et me répondit à voix basse.

« Il y a de cela un grand nombre de fingéliens, alors que tu n’étais qu’une toute petite elfette, une soeur à l’aura captivante est venue visiter le clan Norhen Dagha. Elle nous a raconté son histoire et ensuite son ambition : faire des Elfes Noirs une nation véritable à la place d’un ramassis de clans éparses, isolés des cultures de leurs soeurs et frères.

Beaucoup d’entre nous à l’époque ont été impressionnés par sa détermination. Et parmi ceux là, il y en eu à la suivre et d’autres à aller à la rencontre des autres clans. Quelques décennies plus tard, la nouvelle de la mort de cette soeur et de ses partisans a provoqué une vague glacée de désillusion.

Etyla a interdit à quiconque de quitter le clan pour les missions d’échange et a ordonné que tout sombre n’étant pas du clan soit interdit de séjour et renvoyé sans délai chez lui. Elle estimait que cette femelle avait perdu les faveurs de Lith et qu’il nuirait au clan de continuer de s’engager dans la voie qui avait été tracée.

Les documents parlant de cette soeur sont en la possession d’Etyla. Je doute qu’elle te les laisse voir, Kharay. Elle les conserve dans ses appartements personnels, dans une trappe protégée par de la Magie. Mais, tu sais ‘inil, y toucher sera ta dernière erreur. La Mère-Matrone ne te pardonnera pas, cette fois.»


Je réprimai un sourire de satisfaction et feignit l’obéissance en prenant congé de mon père. J’avais trouvé ma prochaine bêtise.

Re: Dans l'ombre de la Lune...[inachevé]

Publié : 08 avr. 2010, 12:10
par Kharya
La patience est surement la qualité que j’ai développé qui m’a été toujours utile. Pour atteindre mon objectif, les documents dans cette trappe protégé par de Magie Noire, je devais sans aucun doute devenir une Magicienne des plus douées. Ou bien créer le climat idéal pour forcer la Mère-Matrone à lever le sortilège. Dans les deux cas, il fallait attendre, observer et écouter.

Ma supposition de départ était que cette cachette ne devait pas servir uniquement pour ces vieux parchemins. En effet, je finis par apprendre que de vieilles reliques s’y trouvaient aussi. Vu le ton des femelles que j’avais épiées, la tension dans leurs voix, ce devait être en rapport avec ces même évènements passés sous silence. Cependant, cela ne m’offrait pas davantage d’ouverture dans la garde d’Etyla. Il était fort peu probable qu’elle consulte ce contenu régulièrement.

J’avais passé en revu tous les grimoires magiques mais mon inexpérience dans ce domaine freinait ma mission. Pour user de la Magie, il m’aurait fallut 100 fingeliens de pratique supplémentaires pour être efficace sans me donner la mort en même temps.

Un moyen me vint lors d’une méditation. Un leurre. Un faux. Donner une relique ou un vieux parchemin à faire mettre sous scellé ! Jouer de mon innocence en amenant un objet visiblement ancien à faire examiner à notre érudit Mère-Matronne.

Je filai vers la Bibliothèque m’inspirer des textes les plus anciens pour rédiger quelque chose d’un style cohérent dans le contenu, la forme et la calligraphie. Il me fallait aussi soutirer des informations supplémentaires à mon père pour agrémenter de détails mon faux document ainsi que de construire mon histoire sur l’endroit où je l’avais découvert, à moitié brûlé, ce qui justifierai qu’il ne soit qu’incomplet et nécessite expertise.

En quelques mois, j’avais réussit à réunir tout ce qui m’était nécessaire. Mon document avait un bel aspect vieillit par une solution de coloration de cuir brun. J’étais devenue experte en falsification d’écriture et j’avais commencé à montrer une attitude d’exploratrice des fins fonds des cavernes du clan devenues inhabitables, fermées depuis plusieurs fingéliens déjà.

Le temps était venu de demander à voir Etyla.

Re: Dans l'ombre de la Lune...[inachevé]

Publié : 19 janv. 2012, 18:53
par Kharya
Mon document passa entre les mains de Nalym, ma mère, qui devait déterminer si ma demande d'audience pouvait avoir un quelconque intérêt. Peu de temps après, je reçu ma convocation. Je fus surprise de voir la porte de la Mère-Matronne mieux gardée que d'habitude. On me fit entrer. J'avais en tête mon plan et je me répétais toutes les étapes.

Etyla me toisait froidement du regard, je sentais un brin de colère en elle. Elle tenait mon document. Je l'ai saluée selon les usages en m'agenouillant. Elle me demanda de me relever. Elle quitta son trône, alla jusqu'à l'un des brasero et y jeta mon travail. Mon cœur bondit dans ma poitrine et je me contrôlais pour ne rien laisser paraître.

« Un faux. Bien imité, mais c'est un faux, Kharay. » sa voix étrangement calme se changea soudain en déluge de fureur « Petite sotte curieuse ! Qu'avais-tu l'intention de faire ? Gardes ! Emmenez moi cette chose en salle d'interrogatoire ! »

Je n'eus pas le temps de comprendre ce qui venait de se passer que je fus empoignée fermement par les Sœurs Gardiennes et menée directement auprès de ceux qui furent mes instructeurs quelques fingeliens auparavant. On m’enchaîna au mur d'une cellule et on m'y abandonna dans le noir complet.

Je savais très bien ce qui m'attendait. Ils m'affaibliraient à la fois le corps et l'esprit en me laissant là sans me nourrir avec pour seule compagnie mes doutes, mes peurs et mes espérances. Ils finiraient au bout de cinq nuits par venir me faire boire puis me rouer de coups en me posant les questions auxquelles on leur avait demandé de trouver des réponses. Cela recommencerait tous les jours jusqu'à ce que je leur réponde ou demande grâce. Ensuite commenceraient les tortures sur table pour s'assurer des aveux.

Mais il n'en fut pas ainsi. Mon père et ses plus fidèles compagnons vinrent me libérer. Ils m'accompagnèrent jusqu'à la sortie des cavernes. Mon père les remercia et leur ordonna de reprendre leurs postes pour ne pas éveiller de soupçons. Quand à lui, il resta à mes côtés pour m'entraîner le plus loin possible du clan en masquant nos traces.

Je me sentais faible et désorientée, j'avais dû rester trois nuits captive. Mon père me faisait taire dès que la moindre question se formulait sur mes lèvres, nous ne devions pas faire de bruit. Nous nous sommes déplacés ainsi pendant deux jours à marche forcée pour nous éloigner au plus vite du clan. C'est seulement après, qu'il se détendit légèrement et répondit à tout ce que j'avais dû garder sous silence.

« Etyla a annoncé ton bannissement pour blasphème et insubordination au moment où tu as été mise en cellule. Mais nous avons su qu'elle prévoyait autre chose pour toi. Elle veut faire croire que la guilde t'a retrouvée errante autour de l'entrée et va te sacrifier au Temple. C'est une peine de mort camouflée. Je ne sais pas pourquoi elle te craint. Le Maître m'a encouragé a te sauver. Tu ne dois jamais revenir, Kharay. »

Je ne savais pas quoi dire, cette dernière décision de la Mère-Matronne était si excessive par rapport aux précédentes punitions qu'elle m'avait donné. Peut être que quelque chose la retenait avant et qu'elle n'a plus pu se contenir davantage. J'ai laissé s'échapper la seule question qui s'imposait à mon esprit. « Qui-suis je ? »

Re: Dans l'ombre de la Lune...[achevé]

Publié : 21 janv. 2012, 11:50
par Kharya
Mon père sembla mal à l'aise à cette interrogation. Je l'observais attentivement, comme si je voulais deviner ses pensées. Il réfléchissait, pesait le pour et le contre de quelque chose.

« Tu as vu le jour dans un village sylvain à trois jours de marche d'ici. Je t'ai récupérée lors d'un raid du clan. A cette époque nous étions peu nombreux et l'organisation était différente, moins hiérarchisée. Nous avions besoin de matériels et de sang neuf pour bâtir un clan autonome. Nous emmenions tous les elfes à la peau sombre que nous trouvions quel que soit leur âge, quel que soit leur consentement.

Tu étais la plus jeune que nous ayons repérée là bas. Quand je t'ai trouvée, tu étais dans un berceau finement sculpté, avec un autre bébé du même âge, à peine un fingelien. Une fille aux cheveux de nuit et à la peau de lune. Tu étais éveillée et tu me regardais avec ces yeux améthystes qui percent le corps jusqu'à l'âme. Tu m'as tendue les bras en vagissant joyeusement et te tortillant.

Je t'ai prise dans mes bras et enveloppée dans l'écharpe qui servait à masquer mon visage. La petite pâle s'est réveillée et a commencée à pleurer, sonnant l'alerte. Tu as tendu la main vers elle comme pour me demander de l'emmener aussi mais je me suis replié et tu t'es aussi mise à pleurer. Quand nous sommes revenus au clan, Etyla te donna un nom et choisit Nalym comme mère à cause de tes yeux. Je fus désigné comme père pour cette couleur rousse et parce que je t'avais sauvé. »


Le choc de ce que cela impliquait m'a laissé muette. Mon monde s'écroulait. Toute certitude n'était plus que mensonge. Mon père fit ce qu'il pu pour me rassurer. Puis il me reparla de ce vieux rêve d'une terre lointaine et sauvage où je pourrais participer à la construction d'un nouveau clan. Un endroit où je pourrais me faire une nouvelle vie plus libre.

Re: Dans l'ombre de la Lune...[achevé]

Publié : 23 janv. 2012, 14:01
par Kharya
J'ai continué ma route seule, Ashonn devait partir pour une mission factice afin de couvrir sa participation à mon évasion. Il m'avait indiqué le chemin à suivre pour rejoindre le plus proche port de la mer intérieure. La tentation de trouver le village sylvain dont il avait parlé était grande mais je savais que je risquais de ne pas y être bien reçue. J'avais pu constater la haine des pâles à l'encontre des nôtres dans les geôles de la Question.

J'avais assez de vivres pour le reste du chemin mais je chassais pour les économiser. Je n'avais jamais fait de mission à l'extérieur, il était plus que probable que je me perde. Je me cachais dès qu'un bruit suspect se faisait entendre jusqu'à rejoindre enfin la cité portuaire.

Je n'avais rien vu de tel. Je suis restée prudente mais je remarquais que personne ne faisait vraiment attention à moi. Il y avait des personnes de toutes les tailles, aux teints variés et même certains avec une étrange peau bleue. J'avais la chance d'avoir apprise la langue commune auprès des Questeurs pour comprendre les prisonniers et cela me permit de savoir où aller.

Le changement qu'offrait cette ville pour une jeune sombre sortant tout juste des cavernes de son clan était déjà une nouvelle vie. J'appris vite que si je voulais espérer survivre il me faudrait obtenir des pièces d'or, ne serait-ce que pour me nourrir et me vêtir décemment. J'ai essayé d'en apprendre plus sur le métier de forgeron mais les maîtres, souvent nains, m'envoyaient voir ailleurs sans ménagement.

Après quelques fingeliens et plusieurs mésaventures avec des personnes des plus malhonnêtes, j'avais finalement décidé de m'embarquer sur l'un des navires dirigés par des capitaines assez téméraires pour tenter une traversée vers les contrées centrales.