Carnet sauvé des flammes

Ici, l'on conte des chroniques relatives aux îlots centraux
Eugelin
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Carnet sauvé des flammes

Message par Eugelin »

[extrait]

Notre mage a succombé. Sa science est presque perdue.
J'écris en sa mémoire et à sa suite, dans le carnet qu'il tenait.
Il nous faut continuer. Avec notre Louvetier, pour notre Roi.
Le dénouement est proche.
Puisse l'Esprit du Feu Que les ancêtres guident nos pas.


Relevé des inscriptions (et des figures) que nous avons vues sur l'autel :
Lieutenant de Providence,
Entends notre clameur
Qui s'élève vers toi.

grand oiseau au sol, couleur noire, ailes repliées, tourné vers le couchant ;
face à l'animal, prêtre croisant ses bras sur sa poitrine



Notre labeur est terminé.
L'instant est enfin venu
De considérer la cendre dans l'urne
Et de saluer le potier.

deux potiers, l'un modelant de la glaise, l'autre alimentant un four ;
entre eux, prêtre écartant ses bras et ouvrant ses mains



Père Héron, nous te supplions :
Pose l'équinoxe,
Libère les jours,
Enflamme le monde.

plume ou écaille (?) richement décorée, posée sur (allumant ?) le soleil


Notre œuvre est achevée.
Le moment est enfin venu
De considérer le reflet sur l'écu
Et de remercier le forgeron.

deux forgerons, l'un martelant un bouclier, l'autre aérant un foyer ;
entre eux, prêtre tenant une large coupe



Gardien des Âges,
Accompagne notre prière
Qui s'envole avec toi.

grand oiseau dépliant ses ailes, couleur rouge, tourné vers le levant ;
face à l'animal, prêtre levant haut le hanap (?)

Eugelin
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Re: Carnet sauvé des flammes

Message par Eugelin »

[extrait]

Je me souviens des anciens psaumes. Comme ils me semblent justes maintenant que nous sommes si peu nombreux. Thylimond avait bien raison, ce n'est jamais que sa propre tombe que l'on s'évertue à creuser sa vie durant. Je suis heureux que la belle Galealle ait choisi d'épouser le fils du bourgmestre. À présent, une large épée protège sa chevelure et un solide bouclier couvre son flanc. Aucun compagnon d'armes ne consacrera plus sa science de la guerre à me préserver si fidèlement du danger ou de la mort. C'est bien assez que chacun s'occupe de sauver sa tête.

J'ai obéi au Roi et suivi son capitaine de misère. Quel abomination ai-je donc commise pour être de la sorte abandonné en terre si hostile ? Parfois, en marchant dans le bosquet, j'ai l'impression que le mage hurle mon nom et maudit ma présence, comme le ferait un sinistre Sinan revenu du sombre royaume. Mon orgueil m'a laissé croire que je pouvais, en sortant des rangs, abattre la bête d'un unique coup bien placé. Folie ! Par ma faute, notre meilleur savant est tombé.

Je ne rentrerai pas.


Livre des Ambassadeurs, passage de la Délégation :
Car vous êtes leurs émissaires, et votre nom est sacré. Parcourez le monde en son entier, comme les nuages accompagnent le soleil. Rencontrez les enfants de la terre, comme le vent berce les feuilles. Sondez les fondations et mesurez les murs, comme l'ombre révèle les reliefs.

Car vous êtes leurs champions, et votre nom est saint. De vos mains, vous dresserez la tour de guet. Par votre voix, vous insufflerez le chant salvateur. En votre cœur, vous honorerez la persévérance ainsi que la droiture.

Car vous êtes leurs pèlerins, et votre nom est béni. Partout où vous marcherez, vos pas seront comptés. Partout où vous œuvrerez, vos gestes seront remarqués. Partout où vous coucherez, vos rêves seront gardés.

Répandez demain l'espérance qui vous est aujourd'hui confiée, n'en conservez que le poids d'une plume. Au moment du plus grand doute, devant la croisée des chemins, la flamme dissipera l'obscurité.

Eugelin
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Re: Carnet sauvé des flammes

Message par Eugelin »

[extrait]

Les barres d'acier ont bien servi, après tant de jours et de nuits dépensés à extraire le soufre, le charbon et le fer. Malgré les épais gants de cuir que nous portons en permanence, nos mains sont presque en sang. Par chance, si la mine est fort éloignée de notre campement, elle ne semble pas abriter d'autres créatures que des araignées. Bien que répugnantes, ces bestioles sont craintives et ne s'approchent que rarement de nous. Nos épées n'auraient, je pense, guère de mal à percer leurs flancs, mais à quoi bon ? Les fileuses ne s'occupent pas de nous, et c'est très bien ainsi.

Boigan a prestement travaillé. Il a su fondre et assembler les pièces d'alliage pour monter la grande cage. J'espère que la structure sera assez large pour loger la bête, et suffisamment solide pour contenir sa mortelle frénésie. C'est grande pitié que d'énumérer tous les héros suppliciés en cette contrée. Le sacrifice de notre enchanteur n'aura cependant pas été vain. Ses incantations ont finalement immobilisé la créature, nous laissant le temps de l'entraver avec les chaînes rapportées du premier navire. Louée soit la Poigne pour ce répit !

Je ne me laisserai toutefois pas aveugler par les reflets rassurants du métal. Et mes compagnons devraient cesser de croire les affabulations du capitaine. L'antique Kaz-Dûm, l'inaltérable permanence du septentrion, l'accomplissement des bâtisseurs montagnards, conviendrait mieux pour emprisonner un tel fléau. Car ici, privés des épais remparts pierreux de notre cité, coupés de nos phalanges bardées de boucliers et hérissées de lances, nous sommes perdus.

L'espoir est une chimère.


Précis de l'Animalier, passage de la Charge :
Le mouvement est fort complexe à saisir. Chacun sait que nos arts visent une représentation fidèle de la nature, de ses caractères et de ses phénomènes. Cette manière de procéder et d'aboutir génère au final un juste enseignement autant qu'une sereine contemplation.

Il est aisé d'observer le persistant et commode de reproduire l'immobile. En revanche, comment appréhender le fugace et coucher l'inconstant ? Les premiers objets de notre étude seront les coureurs à sabots. Il convient de bien distinguer la licorne du cheval. A priori semblables, chacun possède néanmoins des attributs physiques et des spécificités comportementales qu'il importe de ne jamais confondre. Le sens de l'observation est la plus utile des qualités.

La licorne tout d'abord. Selon les récits mythologiques, cet animal serait un don divin, purifiant les eaux, neutralisant les poisons, éradiquant les maladies et chargeant les bêtes perverties. Sa stature est imposante, mais sa taille est élancée et son allure est gracieuse. D'un aspect général proche du cheval, on remarquera toutefois sa longue pique d'ivoire, sa petite barbe et ses sabots fendus. Sa robe varie du blanc immaculé au gris argenté. Solitaire et farouche, la licorne ne se laisse jamais surprendre, et la maîtrise de ses pas constitue un défi ardu tant pour le cavalier que pour l'artiste.

Eugelin
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Re: Carnet sauvé des flammes

Message par Eugelin »

[extrait]

Quel départ ! Le quartier portuaire baignait dans la lumière du matin. Les festivités en l'honneur de l'expédition battaient leur plein. Pour l'occasion, les souliers aux boucles dorées entouraient les bottes fraîchement graissées. Les dagues à la garde délicatement ouvragée côtoyaient les épées au fil impeccablement tranchant. Les manteaux de velours frôlaient les capes de grosse laine. Les soldats osaient dévisager les dames d'honneur, les courtisanes souriaient aux fils de la noblesse. Les étendards du Roi et des Pairs pointaient vers le soleil, les bannières des gildes flottaient au vent. Aucune anxiété ne troublait les regards, aucune hésitation ne freinait la marche.

Les deux navires armés pour le voyage promettaient tant de conquêtes, de butin et de gloire. Notre fougueux capitaine, personnellement recommandé par le bourgmestre Lhautevoy, haranguait les cœurs et arrosait les gosiers. Notre mage érudit, revenu de son ambassade, narrait les coutumes exotiques des frêles Kultars. Nous envisagions déjà le retour triomphal, sous les acclamations urbaines.

Nous nous bercions d'illusions, comme des enfants couchés après un joli conte. L'oiseau infernal a, le premier, retourné le sablier de nos vies. Les peaux-vertes des grottes et leurs musculeux cousins des plaines cernent à présent notre position et poursuivent le macabre décompte. La rivière n'est pas assez profonde ni le courant assez puissant pour les empêcher d'atteindre notre campement. Les butées de terre, bien que ceintes de piques, n'ont pas la hauteur suffisante pour les retenir. Nous en tuons dix, mais le plus malin perce l'un des nôtres au flanc. Nous en tuons vingt, mais le plus lâche touche l'un des nôtres au dos. Nous en éliminons davantage, mais il se trouve toujours un plus cruel que ses congénères pour nous prendre encore un frère.

D'où nous sommes, nous voyons pourtant nos deux embarcations mouillant dans la crique si proche. Elles étaient pleines d'hommes et de fret en quittant notre pays, autant que peut l'être l'œuf d'une poule bien nourrie. Une seule coque serait à présent sûrement trop grande pour nous recueillir tous. Comme j'ai hâte que le soleil se couche, que nous puissions enfin tenter une sortie vers la mer.


Foire des sept cantons, remise des Prix :
Le fermier Beloi travaille sur le domaine de la combe fleurie. Il s'occupe surtout des perdrix, cailles, pigeons, oies, canards et autres volatiles du Seigneur Hardian. Envoyé au concours par son maître, le bonhomme nous a présenté cet après-midi une fort jolie poule.

L'apparence de l'animal a ému les jurés du lieu, car sa grande huppe, très voyante, retombant en avant, rappelle la coiffe traditionnelle des femmes du Blanversant. Sa barbe, de forme ovale, et ses favoris sont bien développés. Son emplumage est particulièrement riche et doux. Sa poitrine est large, son corps est long. Pour tout dire brièvement, ses proportions sont remarquablement harmonieuses.

De constitution vigoureuse, de tempérament combattif, la poule a le port de tête altier et la démarche fière. L'approcher est un exercice difficile, car elle sait manier le bec aussi sûrement que le maître d'armes sait planter son épée. Le renard n'a qu'à bien se tenir durant la nuit, s'il veut conserver la prunelle de ses yeux.

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